31/08/2017
Christine de Pisan, Cent ballades d'amant et de dame
La Dame LXXVII
Hé Dieux ! que souvent avient,
Doulz ami, ce m’est advis,
Que tu t’en vas ! Ce me tient
Pensif le cuer et le vis,
Oncques tant aller ne vis
Homme, car c’est sans cesser :
Tu n’as ailleurs ton penser.
Je sçay bien qu’il t’appartient
A voyagier, mais tous vifs
Mon cuer en meurt, ne lui tient
D’envoisier, je te pleuvis.
De fort heure oncques te vis,
Tu m’occis par ton tracer :
Tu n’as ailleurs ton penser.
Hé las ! maint amant se tient
Sans tant aller, mais envis
T’en endroies, ne souvient
A ton cuer comment je vifs
En duel quand tu m’es ravis
Mais on ne t’en peut lasser :
Tu n’as ailleurs ton penser.
Or en sois a ton devis,
Bien sçay que tout alouvis
Et de vaillance amasser :
Tu n’as ailleurs ton penser.
Christine de Pisan, Cent ballades d’amant
et de dame, 10/18, bibliothèque médiévale,
1982, p. 108.
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