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04/06/2019

John Clare, Poèmes et proses de la folie

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                                 Je suis

 

Je suis ce que je suis pourtant personne ne le sait ni n’en a cure

Mes amis m’ont abandonné comme on perd un souvenir

Je vais me repaissant moi-même de mes peines —

Elles surgissent pour s’évanouir —armée en marche vers l’oubli

Ombres parmi les convulsives les muettes transes d’amour —

Et pourtant je suis et je vis — ainsi que vapeurs ballotées

 

Dans le néant du mépris et du bruit

Dans la vivante mer des rêves éveillés

Où nul sentiment de la vie ne subsiste ni du bonheur

Rien qu’un grand naufrage en ma vie de tout ce qui me tient à cœur

Oui même mes plus chers soucis — les mieux aimés

Sont étrangers — plus étrangers que tout le reste

 

Je languis après un séjour que nul homme n’a foulé

Un endroit où jamais encore femme n’a souri ni pleuré —

Pour demeurer avec mon Dieu mon Créateur

Et dormir de ce doux sommeil dont j’ai dormi dans mon enfance

Sans troubler — moi-même introublé où je repose

L’herbe sous moi — couvert par la voûte du ciel

 

John Clare, Poèmes et proses de la folie, traduction Pierre Leyris, 1969, p. 77 et 79.

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