25/03/2011
Etienne Faure, Légèrement frôlée - Vues prenables
Souvent mal réveillé le matin,
d’un Bruegel sur une boîte à sucre
il fixait la scène où les corbeaux se ravitaillent,
des hommes tuent le cochon, agités,
en groupe ou isolés, ivres morts, courbatus,
ou consacrant du temps selon la saison à l’amour.
Cette façon de voir les choses en peinture
se poursuivait longtemps certains jours
puis tous les jours
au point de ne plus voir le monde
bientôt qu’en fresque ou portrait miniature
en teinte dégradées, le soir
admirant la prouesse du peintre
aux mille tableaux entre chien et loup
qui assombrit sans cesse
à la vitesse du déclin sa palette
puis noircit à la nuit le tableau final
de noir d’ivoire ou de noir d’os,
rêvant, progressivement diluée, d’une aube à la sanguine.
En peinture
Étienne Faure, Légèrement frôlée, éditions Champ Vallon, 2007, p. 43.
Où le copiste assis devant le tableau grand ouvert
s’évertue sur un paysage imprenable,
net on s’arrête, interdit, se disant
comme un matin à la fenêtre qui encadre
une vue : devant lui tant de beauté quoi faire,
paraphraser ce paysage,
cette peinture en son temps que surprit
le même saisissement original,
simple réplique, repris à l’identique,
ou alors en extraire un pan et le mettre en présence
d’autres siècles, d’autres ciels, d’autres arbres,
que la greffe en prenant fructifie, devienne
un autre organisme qui plus tard étonne
et tel un tableau non peint mais vivant offre
une énième fenêtre ou vison ouverte, à son tour
vue prenable.
Les vues prenables
Étienne Faure, Vues prenables, éditions Champ Vallon, 2009, p. 43.
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