01/03/2015
Jean-Philippe Salabreuil, La liberté des feuilles
Lied aux ombres d’hiver
Un matin le vent traverse les cendres
Du jeune jour maigre et ce sont
Comme d’anciens temps gris qui recommencent
Où sans rimes ni raisons
Nous vivions de beau silence
Et de belle folie.
Tu me regardes et si je te délie
Maintenant des chanvres de froide pluie
Sans doute vas-tu sourire et que luise
un instant l’âme lointaine j’épuise
Au souffle court ce vieil été d’aubes moisies
Tu n’échapperas plus au verger de mes mains
Le ciel gris passe entier parmi les doigts des morts
Ensemble souviens-toi de cette forêt torte
Nous l’avons fait pencher jusqu’aux eaux du matin
Je me souviens je t’aime et me souviens
Il y avait encore une prairie
Fleurie de larmes et d’abandons
Nous en avons sur nous fermé la grille
Est-il passé depuis tant de saisons ?
Sommes rentrés dedans mille et mille matins
Depuis le temps le temps que je t’ouvre mes mains.
Jean-Philippe Salabreuil, La liberté des feuilles, « Le Chemin », Gallimard, 1964, p. 45.
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