07/11/2014
Stamatis Polenakis, "Les escaliers d'Odessa", traduction de Myrto Gondicas
Viola d'amore
Olga, si je meurs aujourd'hui,
j'espère que demain tu m'oublieras.
Rappelle-toi seulement le bateau entre Odessa
et Trieste, un après-midi d'été
dans une vie lointaine, et, oublié même de Dieu,
l'orchestre qui jouait des chansons russes populaires
sur le port ; l'étudiant
Trofimov, qui voyageait avec nous
et qui plus tard a disparu en Sibérie.
Surtout rappelle-toi les mouettes,
elles étaient très blanches et elles nous ont accompagnés
tout au long du voyage, en volant plus vite
que les vagues même.
Ich sterbe, Olga.
Aujourd'hui je meurs pour toujours.
Stamatis Polenakis, "Les escaliers d'Odessa", traduction de Myrto Gondicas, dans la revue de belles-lettres, 2014, I, p. 71.
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NUMÉRO ZÉRO est une revue expérimentale à ciel ouvert qui s’intéresse à l’écriture comme processus de travail, en amont de sa formalisation définitive et sous toutes ses formes. C’est un laboratoire de création qui invite des écrivains et des artistes à participer pendant un an à des rencontres publiques mensuelles, à un site internet, à une édition papier, et à prendre en charge une rubrique dans chacun de ces formats. entrée gratuite Durée 1h L'entretien sera suivi d'une dégustation de vins en partenariat avec R'Vinum ACADEMIE D'ARCHITECTURE HOTEL DE CHAULNES 9 PLACE DES VOSGES 75004 PARIS |
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15/09/2013
Umberto Saba, Couleur du temps
Le ghetto de Trieste
Vers 1860, le ghetto de Trieste était encore dans la floraison de ses dégoutantes origines. Mis depuis un demi siècle au même niveau que les autres citoyens, affranchis de gabelles particulières et de traitements spécifiques humiliants, les Juifs nés ou émigrés dans la ville franche n'avaient pas tous appris à vaincre une méfiance congénitale à mêler leur vie quotidienne à celle des "goy" qu'ils redoutaient (et donc détestaient). Cette aversion, qui n'était pas religieuse, et que, nulle part où elle existe, le baptême n'efface, car elle est enracinée en eux par des millénaires de persécutions et de quarantaines, retenait même quelques familles, assez aisées pour habiter une maison neuve dans une rue nouvelle, dans la "citadelle" où leurs vieux parents avaient exercé et exerçaient le métier de brocanteur, puisant dans leurs capharnaüms pittoresques, leur force. Les maisons neuves, construites comme un excellent investissement de capitaux pour riches veuves, et ceux qui craignaient de plus grands risques, étaient, c'est vrai, le rêve de beaucoup : mais, après les avoir acquises pour spéculer, les nouveaux propriétaires continuaient, en ce qui les concernait, à habiter dans ce ghetto bien-aimé, à leurs yeux empli d'intimités et de souvenirs. En vertu de la tradition et par la force d'inertie d'une habitude mentale devenue, comme une quelconque idée fixe, un poids plus difficile à décharger qu'à porter.
Umberto Saba, Couleur du temps, traduction René de Ceccatti, Rivages, 1989, p. 139-140.
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