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14/03/2016

Nicolas Pesquès, La face nord du Juliau, treize à seize

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Le 21 avril [2011]

 

Quand on avance dans la description d’une sensation, d’une pensée ou d’un objet, on fait les trois en même temps, on avance de front :

 

Je vais au genêt, j’entred ans le jaune. Le brouillard épaissit mais la densité est extrêmement grenue, tactile, vivable.

La phrase n’est pas assurée quand bien même le corps la pousserait. La pensée ajoute du trouble à l’objet troublant. À moins que ce soit la sensation qui, d’avancer à découvert, d’ecister en propre, rameute ce qui lui convient : du jeune intense et de la pensée subséquente.

À la fin, les trois ayant eu lieu, tout se fend, éclabousse. Le plaisir est profond, le langage est abandonné. En même temps on dirait que l’abstraction s’implante, qu’elle est la reprise douce et musclée du motif. La colline reprend le dessus.

 

Nicolas Pesquès, La face nord du Juliau, treize à quinze, Flammarion, 2016, p. 143.

 

 

24/01/2016

Fernando Pessoa, Pour un ''Cancioneiro"

 

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On dit que je feins ou mens

Tout ce que j’écris. Mais non,

Moi, simplement, je sens tout

Avec l’imagination.

Je ne me sers pas du cœur.

 

Tout ce que je rêve ou éprouve,

Ce qui me manque ou m’accomplit,

est comme une terrasse

Sur autre chose encore.

C’est cette chose qui est belle.

 

C’est pourquoi j’écris au milieu

De ce qui n’est pas à côté,

Délivré de tous mes émois,

Sérieux de tout ce qui n’est pas.

Sentir ? C’est au lecteur de sentir !

 

Fernando Pessoa, Pour un ‘’Cancioneiro’’,

traduction Patrick Quillier, dans Œuvres

poétiques, Pléiade / Gallimard, 2001, p. 176.