22/02/2017
Tom Raworth (1938-2017), Penser un titre
Penser un titre
plus tard elle lui marcherait
sur les pieds en dormant
jusqu’au bord de l’inspiration
les ongles vernis
arrêtés au milieu d’une phrase
négligeant — méprisant
la courbe légendaire des étoiles
élaborant des stratagèmes
rétrécissait dans sa tête
jusqu’à emplir le jour
créant une illusion
la radiation d’un éclair orange
englouti dans le vide
au-delà des étangs, en bas des collines
Tom Raworth, Penser un titre, traduction de
l’anglais par Marie Borel et Jacques Roubaud, dans
intempéries, textes Éric Audinet, Tom Raworth,
Sarah Clément, photographies Jean-Yves Cousseau,
éditions isabelle sauvage, 2017,
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tom raworth, penser un titre, marie borel, jacques roubaud | Facebook |
25/10/2013
Marie Borel, Loin
j'ai choisi dans la mesure où je n'avais pas le choix
je rêve et me souviens et en rêvant j'écris ceci
je prendrai tes doigts endormis je les poserai
en rêvant sur mon cou
les doigts de ceux qu'on aime sont des gouttes de pluie
des coquillages en place d'ongles boire l'eau fraîche
en fermant les yeux pour s'isoler
manger des œillets durs comme tes seins menus
je n'ai pas tourné la tête
mais quelque chose en moi s'est mis à trembler
je t'ai reconnue à ta jambe pensive tes genoux lustrés
ma buveuse de thé
tu t'es inclinée en dansant amoureuse d'un clavecin
au milieu d'un bonheur frêle on entend des ruisseaux
des chiens et des abeilles
tu racontes des histoires des histoires ou bien des rêves
nonchalance & absolut ou aquavit
midi dormait sur les pierres celle que tu connais
depuis une heure a mis sa main sur ton bras nu
je songe au peu que tu me donnes
conclus que tu ne m'aimes pas
désolation muette des dimanches
je me couche sur ta nuque au-dessus de ce petit os
il fait une saillie
et par le dieu de tes doigts et des espaces entre tes doigts
deux fois je t'ai revue dans des salons
dansant parmi les dorures
nous avons dit quelques mots feints je n'en peux plus
ma bouche est pleine de ta poussière
ensuite il a neigé l'oubli
moi j'imagine ces histoires
et sur mes genoux le chat les écrit
(c'est une chatte)
du moment qu'une porte est fermée
les mots prononcés derrière doivent y rester
Marie Borel, Loin, éditions de l'Attente, 2013, p. 100-101.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marie borel, loin, rêve, histoire, amour perdu | Facebook |