18/06/2021
Jean de La Fontaine, Le vieux Chat et la jeune Souris
Le vieux Chat et la jeune Souris
Une jeune Souris de peu d’expérience
Crut fléchir un vieux Chat implorant sa clémence,
Et payant de raison le Raminogrobis :
Laissez-moi vivre : une Souris
De ma taille et de ma dépense
Est-elle à charge en ce logis ?
Affamerais-je, à votre avis,
L’Hôte et l’Hôtesse, et tout leur monde ?
D’un grain de blé je me nourris ;
Une noix me rend toute ronde.
À présent je suis maigre ; attendez quelque temps
Réservez ce repas à Messieurs vos Enfants.
Ainsi parlait au Chat la Souris attrapée.
L’autre lui dit ; Tu t’es trompée.
Est-ce à moi que l’on tient de semblables discours ?
Tu gagnerais autant de parler à des sourds.
Chat et vieux pardonner ? cela n’arrive guères.
Selon ces lois, descends là-bas,
Meurs, et va-t’en tout de ce pas
Haranguer les sœurs Filandières.
Mes Enfants trouveront assez d’autres repas.
Il tint parole ; et pour ma fable,
Voici le sens moral qui peut y convenir :
La jeunesse se flatte, et croit tout obtenir.
La vieillesse est impitoyable.
La Fontaine, Fables, 12, V, Pléiade/Gallimard, 2021, p. 771.
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