Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

26/09/2024

Erwann Rougé, Asile

   Unknown-1.jpeg

Ici       le temps circule

dans les lits sous les draps

on ne dort jamais vraiment

 

la peau fine des murs se resserre

les ongles se raccrochent

 

Elle     rêve un lait noir constellé

à longueur une et infinie

 

il n’y a pas d’heure dans la nuit

larmes et spasmes

Elle     suce la rondeur d’un galet

 

au matin

              il faudra changer les draps

 

Erwann Rougé, Asile, éditions Unes,

2024, p. 26.

29/12/2017

Jacques Lèbre, L'immensité du ciel

Jacques Lèbre.jpg

C’est soudain, c’est toujours soudain,

rien d’une glissade, finalement,

rien d’une pente quand on arrive au fond

 

quelque chose comme une corde qui casse

 

ce qui nous lie, ce qui nous liait,

que faire d’une relation désœuvrée ?

 

Des larmes autour

comme la corde qui s’effiloche

à l’endroit cassé

 

et mettre des mots là-dessus ?

 

Jacques Lèbre, L’immensité du ciel, La Nouvelle

Escampette, 2016, p. 41.

11/02/2016

Giorgio de Chirico, Mélancolie

  MTE5NDg0MDU0OTIzNjA5NjE1.jpg

                           

             Mélancolie

 

Lourde d’amour et de chagrin

mon âme se traîne

comme une chatte blessée

— Beauté des longues cheminées rouges

Fumée solide.

Un train siffle. Le mur

Deux artichauts de fer me regardent.

 

J’avais un but. Le pavillon ne claque plus

 — Bonheur, bonheur, je te cherche —

Un petit vieillard si doux chantait doucement

une chanson d’amour.

Le chant se perdit dans le bruit

de la foule et des machines

Et mes chants et mes larmes se perdent aussi

dans les cercles horribles

ô éternité.

 

Giorgio de Chirico, Poèmes, Solin, 1981, p. 25.

                                                                  

 

13/05/2015

Paul Louis Rossi, Visage des nuits

2575672527.jpg

 

                         Gens de peu

 

Gens de peu et gens de rien

Quel est le bras qui vous retient

 

Lorsque vous passez la Seine

Sans amours qui vous soutiennent

 

Vous pensez je le sais bien

Sans veine que tout est vain

 

Sans amis qui se souviennent

À vous jeter dans la Seine

 

Sachez que ce n’est pas la peine

De troubler l’eau avec des larmes

 

Essayez de donner l’alarme

Si le courant vous entraîne

 

Le Fleuve est moins bon que vous-même

Pourquoi voulez-vous qu’il vous aime

 

Paul Louis Rossi, visage des nuits, Poésie /

Flammarion, 2005, p. 97.

© Photo Chantal Tanet

 

21/06/2013

Pierre Reverdy, Pierres blanches

images.jpeg


La rue qui chante

 

Les voix qui tournaient

Dans la rue en pente

Celui qui montait

La tâche accomplie

Il y a des lettres sur le mur

Et tout le monde qui regarde

Les étoiles pendent

Les becs de gaz tremblent

                        Le vent

Je marche

Et l'air entier passe devant

Quand la terre tourne plus vite

Où pourrait-on se retenir

C'est peut-être la peur

Qui nous empêche de courir

Et ce sont les mots qui s'envolent

Les feuilles

Et tous les rideaux

Pour voir ce qu'il y a derrière

Dessous

Les larmes sur la gouttière de la cour

 

Pierre Reverdy, Pierres blanches, dans Œuvres complètes, II, édition préparée, annotée et présentée par Pierre-Alain Hubert, Flammarion, 2010, p. 245.