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09/10/2025

William Butler Yeats, L'escalier en spirale

w. b. yeats, l'escalier en spirale, jean-yves masson

 Après un long silence

Des mots après un long silence ; maintenant
Que tous les autres amants sont séparés ou morts,
Qu’un abat-jour voile la lumière inamicale de la lampe
Et que les rideaux sont tirés sur l’inamicale nuit,
Il est bon que nous improvisions encore et encore
Sur ces thèmes suprêmes, l’Art et le Chant :
La décrépitude du corps est sagesse ; quand nous étions jeunes,
Nous nous aimions et nous étions des ignorants.
 

After long silence

Speech after long silence; it is right,
All other lovers being estranged or dead,
Unfriendly lamplight hid under its shade,
The curtains drawn upon unfriendly night,
That we descant and yet again descant
Upon the supreme theme of Art and Song :
Bodily decrepitude is wisdom ; young
We loved each other and were ignorant.

          •  

Mort

Ni peur ni espérance n’assistent
Un animal qui meurt ;
Un homme, lui, attend sa fin
En craignant, en espérant tout ;
Bien des fois déjà il mourut,
Bien des fois il ressuscita.
Un grand homme dans son orgueil
Confronté à des meurtriers
N’a que mépris et dédain
Pour le souffle de la vie ;
La mort, il la connaît à fond –
C’est l’homme qui a créé la mort.
 

Death

Nor dread nor hope attend
A dying animal ;
A man awaits his end
Dreading and hoping all ;
Many times he died,
Many times rose again.
A great man in his pride
Confronting murderous men
Casts derision upon
Supersession of breath ;
He knows death to the bone –
Man has created death.

William Butler Yeats, L’escalier en spirale et autres poèmes [The Winding Stair and Other Poems ; From ‘Full Moon in March’], présenté, annoté et traduit de l’anglais par Jean-Yves Masson, [édition bilingue] éditions Verdier, 2008, p. 119 et 118, 23 et 22.

04/06/2012

William Butler Yeats, L'escalier en spirale (traduit par J.-Y. Masson)

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          Jeunesse et vieillesse d'une femme

 

                                II

               Avant la création du monde

 

Si je mets du noir sur mes cils,

Si je fais mes yeux plus brillants

Et mes lèvres plus écarlates,

Ou vais de miroir en miroir

En leur demandant si tout va bien,

Nul étalage de vanité en cela :

Je cherche le visage que j'avais

Avant la création du monde.

 

Et si je regardais un homme

Comme s'il était mon bien-aimé,

Alors que mon sang reste froid

Et que mon cœur est indifférent ?

Pourquoi devrait-il m'estimer cruelle

Ou s'estimer trahi ?

Je voudrais qu'il aime ce qui était

Avant la création du monde.

 

                                  V

            

                      Consolation

 

Oui, il y a bien de la sagesse

Dans les sentences des sages :

Mais étends ce corps un instant

Et laisse reposer ta tête

Jusqu'à ce que j'aie dit aus sages

En quel lieu l'homme trouve son réconfort.

 

Comment la passion pourrait-elle être aussi violentc

Si je n'avais jamais pensé

Que le crime d'être né

Assombrit tout notre destin ?

Mais au lieu même où le crime est commis,

Le crime peut aussi être oublié.

 

                   Father and child

 

She heards me strike the board and say

That she is under ban

Of all good men and women,

Being mentioned with a man

That has the worst of all bad names;

And thereupon replies

That his hair is beautiful,

Cold at the March wind his eyes.

 

               Consolation

 

O but there is wisdom

In what the sages said:

But strecht that body for a while

And lay down that head

Till I have sold the sages

Where man is comforted.

 

How could passion run so deep

Had I never thought

That the crime of being born

Blackens all our lot ?

But where the crime's committed

The crime can be forgot.

 

W. B. Yeats, L'escalier en spirale [The Windox Stairs and Other Poems], présenté, annoté et traduit de l'anglais par Jean-Yves Masson, Verdier, 2008, p. 131 et 135, 130 et 134.