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23/03/2013

Écrits de Laure

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   Je le sens bien maintenant : « mon devoir m'est remis » lequel exactement ?

   C'est parfois si lourd et si dur que je voudrais courir dans la campagne.

   Nager dans la rivière

    oublier tout ce qui fut, oublier l'enfance sordide et timorée, le vendredi Saint, le mercredi des cendres,

   l'enfance tout endeuillée à odeur de crêpe et de naphtaline.

   L'adolescence hâve et tourmentée.

   Les mains d'anémiée.

   Oublier le Sublime et l'infâme

   Les gestes hiératiques

   Les grimaces démoniaques.

     Oublier

     Tout élan falsifié

     Tout espoir étouffé

     Ce goût de cendres

     Oublier qu'à vouloir tout

     on ne peut rien

 

   Vivre enfin

   « Ni tourmentante

   Ni tourmentée »

   Remonter le cours des fleuves

   Retrouver les sources des montagnes

   les femmes les vrais hommes travailleurs

   qui enfantent

   moissonnant

   M'étendre dans les prairies

   Quitter ce climat

   Ses dunes, ses landes sablonneuses, cette grisaille et ses déserts artificiels,

   Ce désespoir dont on fait vertu,

   Ce désespoir qui se boit

   se sirote à la terrasse des cafés

   s'édite... et ne demanderait qu'à nourrir très bien son homme

   Vivre enfin

   Sans s'accuser

   ni se justifier

   Victime

   ou coupable

   Comment dire ?

   Un tremblement de terre m'a dévastée

 

   On t'a mordu l'âme

   Enfant !

   Et ces cris et ces plaintes

   Et cette faiblesse native

   Oui —

   Et s'ils ont vu mes larmes

   Que ma tête s'enfonce

   jusqu'à toucher

   le bois

   et la terre.

 

Écrits de Laure, précédé de Ma mère diagonale de Jérôme Peignot, avec un "vie de Laure" par Georges Bataille, Pauvert, 1971, p. 227-229.

02/05/2012

Laure, Écrits

Laure, écrits, Jérôme Peignot

Qui es-tu

visage aigu

lame

à reflets durs

fend l'air

entame

mon rêve

que je sois assise

te faisant face

ou couchée

tête renversée

tu m'apparais

échappant à la pesanteur

inscrivant dans l'air

toute une géométrie précise

aussi précise

que cet angle volontaire

où s'inscrit le sourire forcé

de lèvres amères

aux plis railleurs

Précision des gestes,

limite

de l'espace harmonieux,

clair

où tu vis

 

                   *

 

Le moment

où tout retombe

dans l'absurde

si absurde

que mieux vaut

parler

pour ne rien dire

grimacer

et sourire

 

Laure, Écrits, précédé de Ma Mère diagonale par Jérôme Peignot,

avec une Vie de Laure par Georges Bataille, Jean-Jacques Pauvert, 1971,

p. 232 et 233.

© Cliché collection Jérôme Peignot.