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06/11/2022

Cioran, De l'inconvénient d'être né

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N’est profond, n’est véritable que ce que l’on cache. D’où le force des sentiments vils.

 

Ce n’est pas la peine de se tuer, puisqu’on se tue toujours trop tard.

 

Plus on est lésé par le temps, plus on veut y échapper. Écrire une page sans défaut, une phrase seulement, vous élève au-dessus du devenir et de ses corruptions. On transcende la mort par la recherche de l’indestructible à travers le verbe, à travers le symbole même de la caducité.

 

Je n’ai pas rencontré un esprit intéressant qui n’ait été largement pourvu en déficiences inavouables.

 

Emily Bronté. Tout ce qui émane d’elle a la propriété de me bouleverser. Haworth est mon lieu de pèlerinage.

 

Cioran, De l’inconvénient d’être né, Pléiade / Gallimard, 2011, p. 754, 756, 768, 758, 761, 762.

21/09/2015

Ted Hughes, Birthday Letters, traduction Sophie Doizelet

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                           Wuthering Heights

 

Walter était le guide. Le cousin de sa mère

Avait hérité de quelques assiettes à soupe des Brontë.

Il se sentait désolé pour elles. Les écrivains

Sont des gens pitoyables. Ils se cachent de la réalité,

La déguisent. Mais ton euphorie transatlantique

L’a rendu euphorique. Il est entré en effervescence

Comme son vin de rhubarbe gardé trop longtemps :

Une récolte de légendes et de racontars

Au sujet de ces pauvres filles. Puis,

Après le presbytère, après la chaise longue

Où était morte Emily, les minuscules livres faits main,

Les dentelles délicates, les chaussures pour petites fées,

Ce fut le chemin tracé depuis Stanbury. L’ascension,

Un mile toujours plus loin, plus haut, menant

À l’Éden privé d’Emily. C’était pour toi à présent

Que la lande se soulevait, déployait

Ses fleurs sombres. C’était bien.

Plus sauvage, peut-être, qu’Emily ne l’avait jamais vu.

Les pieds mouillés, la tête nue,

Elle montait péniblement cette colline pour rejoindre ses seuls amis —

On peut l’imaginer. Une forteresse obscure.

[...]

 

Ted Hughes, Birthday Letters, traduit de l’anglais et présenté par

Sophie Doizelet, Poésie / Gallimard, 2015, p. 83.