14/11/2021
Fabienne Raphoz, Ce qui reste de nous
Il était une fois
un trille dans la forêt
l’air ouvert devant moi
s’était déjà re
fermé un chevreuil me
surprit comme une
pensée soudaine
derrière l’écran
Fabienne Raphoz, Ce qui reste de nous,
Héros-Limite, 2021, p. 59.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fabienne raphoz, ce qui reste de nous, trille, chevreuil | Facebook |
09/06/2016
Claude Dourguin, Points de feu
Mars sur sa fin : l’orge est sorti de terre, la grande parcelle a changé de couleur imperceptiblement (je l’ai sous les yeux, au sens propre puisqu’elle s’étend à quelques mètres en contrebas, chaque jour), brun roux puis strié à peine, irrégulièrement selon le sol, de vert pâle, puis quadrillé de franches bandes vertes. Les tiges ont à peine quelques centimètres mais cela suffit : désormais chaque matin une bande de chevreuils — deux adultes et trois jeunes — prennent leur petit déjeuner en même temps que moi. Souvent ils renouvellent l’opération le soir, tôt vers six heures, six heures et demie. Ils broutent en tranquillité, nonchalants comme s’ils savouraient les jeunes pousses succulentes, tendres à coup sûr, et, sans doute, le font-ils — quelle raison de les croire dénués de goût ?
Claude Dourguin, Points de feu, Corti, 2016, p. 25.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : printemps, claude dourguin, points de feu, orge, chevreuil, goût | Facebook |
11/04/2016
Camille Loivier, Poèmes, dans Rehauts
Photo Michel Durigneux
chacun a une maison vide abandonnée
dans un coin de la mémoire chacun a
cette forme au fond de la tête dont il se
sauve où il rentre la nuit
(expecta la mano de nieve
tu sors par la fenêtre sur les toits blancs
car cette main blanche se tend vers toi
tu vois cette main de neige qui te dit viens
sauve toi saute sur le toit car bientôt
tout aura disparu et tu seras survivant
- - - expecta la mano de nieve)
mais derrière la maison il y a quelque chose
une présence
entre dans une maison comme un voleur
un inconnu sans repère qui ne sait pas
où il va
va vite entre les murs
oiseau se tape aux fenêtres
— je regarde dehors le monde est maison
dans le chèvrefeuille je trouve un nid abandonné
dans le chèvrefeuille qui gonfle le mur la maison devenue
végétale s’envole ramifiée au monde
un chevreuil entre pour se protéger
dans le chèvrefeuille chevreuil
Camille Loivier, Poèmes, dans Rehauts, n° 37, printemps
été 2016, p. 78-79.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maison, rêve, chèvrefeuille, chevreuil, camille loivier | Facebook |