15/02/2012
Erich Fried, Es ist was es ist (C'est ce que c'est), traduction C. Tanet, M. Hohmann
Mais peut-être
Mes grandes paroles
ne me protègeront pas de la mort
et mes petites paroles
ne me protègeront pas de la mort
absolument aucune parole
et le silence entre
les grandes et les petites paroles
ne me protègera pas davantage de la mort
Mais peut-être
quelques-unes
de ces paroles
et peut-être
en particulier les plus petites
ou encore le silence seul
entre les paroles
protègeront quelques-uns de la mort
quand je serai mort
Aber vielleicht
Meine großen Worte
werden mich nicht vor dem Tod schützen
und meine kleinen Worte
werden mich nicht vor dem Tod schützen
überhaupt kein Wort
und auch nicht das Schweigen zwischen
den großen und kleinen Worten
wird mich vor dem Tod schützen
Aber vielleicht
werden einige
von diesen Worten
und vielleicht
besonders die kleineren
oder auch nur das Schweigen
zwischen den Worten
einige vor dem Tod schützen
wenn ich tot bin
Pouvoir de la poésie
« Ton poème génial
ne sera pas seulement très utile
et rendra la traversée plus sûre
que jamais
parce qu’il avertit sans faillir
de la présence d’icebergs
sur une mer apparemment libre
mais
grâce à la beauté de ta description
des icebergs et de la houle
et du choc
entre la nature sauvage
et l’homme son vainqueur
il te rendra aussi immortel ! »
Voilà à peu près ce qu’aurait dit
une jeune fille
à un jeune poète
en le regardant
extasiée
dans le salon du navire
la veille de la fin de la traversée
à en croire un témoin
dont ces paroles ne purent sortir de la tête
ensuite après la catastrophe
ni après son sauvetage
dans un de ces canots
surchargés
Macht der Dichtung
Dein geniales Gedicht
wird nicht nur sehr nützlich sein
und die Seefahrt sicherer machen
als je bisher
weil es so unüberhörbar
vor Eisbergen warnt
auf scheinbar offener See
sondern es wird
dank der Schönheit deiner Beschreibung
der Eisberge und der Wogen
und des Zusammenstoßes
zwischen der wilden Natur
und ihrem Besieger Mensch
auch dich unsterblich machen!»
Das etwa soll ein Mädchen
zu einem jungen Dichter
gesagt haben
den sie dabei
schwärmerisch ansah
im Schiffssalon
am Tag vor dem Ende der Fahrt
laut Bericht eines Zuhörers
dem die Worte dann nach dem Unglück
nicht aus dem Kopf gingen
auch nicht nach seiner Bergung
aus einem der überfüllten
Rettungsboote
Congé
Le bien
s’envole désormais
là
où tout
ne sombre pas toujours
dans le passé
mais où chaque jour
se lève
et se couche
comme le soleil
Abschied
Das Gute
fliegt jetzt davon
dorthin
wo alles
nicht immer
in die Vergangenheit fällt
sondern täglich
auf-
und untergeht
wie die Sonne
Erich Fried, poèmes extraits de Es ist was es ist (Verlag Klaus Wagenbach, Berlin, 1983), traduction inédite de Chantal Tanet et Michael Hohmann.
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13/06/2011
Erich Fried, Es ist was es ist (C'est ce que c'est), traduction C. Tanet, M. Hohmann
Sterbeleben
Ich sterbe immerzu
und immeroffen
Ich sterbe immerfort
und immer hier
Ich sterbe immer einmal
und immer ein Mal
Ich sterbe immer wieder
Ich sterbe wie ich lebe
Ich lebe manchmal hinauf
und manchmal hinunter
Ich sterbe manchmal hinunter
und manchmal hinauf
Woran ich sterbe?
Am Haß
und an der Liebe
an der Gleichgültigkeit
an der Fülle
und an der Not
An der Leere einer Nacht
am Inhalt eines Tages
immer einmal an uns
und immer wieder an ihnen
Ich sterbe an dir
und ich sterbe an mir
Ich sterbe an einigen Kreuzen
Ich sterbe in einer Falle
Ich sterbe an der Arbeit
Ich sterbe am Weg
Ich sterbe am Zuvieltun
und am Zuwenigtun
Ich sterbe so lange
bis ich gestorben bin
Wer sagt
daß ich sterbe?
Ich sterbe nie
sondern lebe
Le vivre mourir
Je meurs toujours et sans cesse
et toujours à découvert
Je meurs toujours et toujours
et toujours ici
Je meurs toujours une fois
et toujours chaque fois
Je meurs continûment
Je meurs comme je vis
Parfois j’escalade la vie
et parfois je la dégringole
Parfois je dégringole la mort
et parfois je l’escalade
De quoi je meurs ?
De la haine
et de l’amour
de l’indifférence
de l’abondance
et de la misère
Du vide d’une nuit
du contenu d’un jour
de nous toujours une fois
et encore toujours d’eux
Je meurs de toi
et je meurs de moi
Je meurs de quelques croix
Je meurs dans un piège
Je meurs du travail
Je meurs du chemin
Je meurs du trop à faire
et du trop peu à faire
Je meurs aussi longtemps
que je ne suis pas mort
Qui dit
que je meurs ?
Jamais je ne meurs
bien au contraire je vis
Erich Fried, Sterbeleben, extrait de Es ist was es ist (Verlag Klaus Wagenbach, Berlin, 1983). Traduction inédite de Chantal Tanet et Michael Hohmann.
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21/03/2011
Erich Fried, Zukunft? / Avenir ? (traduction Chantal Tanet et Michael Hohmann)
Zukunft?
In Hiroshima und Nagasaki schmolz der
Straßenstaub stellenweise zu einer glasigen Masse
Die Sonne ist die Sonne
Der Baum ist ein Baum
Der Staub ist Staub
Ich bin ich du bist du
Die Sonne wird Sonne sein
Der Baum wird Asche sein
Der Staub wird Glas sein
Ich und du werden Staub sein
Die Sonne bleibt die Sonne
Der Baum darf nicht Asche sein
Der Staub soll nicht Glas sein
Ich will nicht Staub sein
Du willst nicht Staub sein
Wir wollen nicht Staub sein
Sie wollen nicht Staub sein
Aber was tun wir alle?
Avenir ?
À Hiroshima et Nagasaki la poussière des rues
a fondu par endroits en une masse informe
Le soleil est le soleil
L’arbre est un arbre
La poussière est poussière
Je suis moi tu es toi
Le soleil sera soleil
L’arbre sera cendre
La poussière sera verre
Moi et toi serons poussière
Le soleil reste le soleil
L’arbre n’a pas le droit d’être cendre
La poussière ne doit pas être verre
Je ne veux pas être poussière
Tu ne veux pas être poussière
Nous ne voulons pas être poussière
Ils ne veulent pas être poussière
Mais que faisons-nous tous ?
Erich Fried, Zukunft?, extrait de Es ist was es ist, Berlin, Verlag Klaus Wagenbach, 1983 ; rééd., 2005, page 63. Traduction inédite de Chantal Tanet et Michael Hohmann.
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