11/10/2013
Pierre Reverdy, La Lucarne ovale

Les vides du printemps
En passant une seule fois devant ce trou j'ai penché mon front
Qui est là
Quel chemin est venu finir à cet endroit
Quelle vie arrêtée
Que je ne connais pas
Au coin les arbres tremblent
Le vent timide passe
L'eau se ride sans bruit
Et quelqu'un vient le long du mur
On le poursuit
J'ai couru comme un fou et je me suis perdu
Les rues désertes tournent
Les maisons sont fermées
Je ne peux plus sortir
Et personne pourtant ne m'avait enfermé
J'ai passé des ponts et des couloirs
Sur les quais la poussière m'aveugle
Plus loin le silence trop grand me fit peur
Et bientôt je cherchais à qui je pourrais demander mon chemin
On riait
Mais personne ne voulait comprendre mon malheur
Peu à peu je m'habituais ainsi à marcher seul
Sans savoir où j'allais
Ne voulant pas savoir
Et quand je me trompais
Un chemin plus nouveau devant moi s'éclairait
Puis le trou s'est rouvert
Toujours le même
Toujours aussi transparent Et toujours aussi clair
Autrefois j'avais regardé ce miroir vide et n'y avais rien vu
Du visage oublié à présent reconnu
Pierre Reverdy, La Lucarne ovale, dans Œuvres complètes, tome I,
édition préparée, présentée et annotée par Pierre-Alain Hubert,
"Mille et une pages", Flammarion, 2010, p. 80-81.
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21/12/2012
Chloé Bressan, le chant de le femme d'argile

Par un scintillant un rayon de jour brodé sur le temps, chiffre un, étoilé, recommence janvier. Grise étendue de ciel, grisance paradis éternel par un scintillant un rayon de jour brodé sur le temps, chiffre deux, glissant sourire parallèle par un scintillant un rayon de jour brodé sur le temps, chiffre un, étoilé, recommence par un scintillant, un rayon de jour brodé par un scintillant un ...
À son rêve
elle oppose un sourire
muet
des lézardes le long de l'échine
elle est
immobile
vision opaline, regard pierreux
sans refuge
son beau visage mais de peur
effraie le passant qui
de regard
s'arcboute
se rétracte
s'abîme au soir transi
[...]
Chloé Bressan, le chant de le femme d'argile, éditions
isabelle sauvage, 2012, p. 7-8.
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23/08/2011
Paul Éluard, L'amour la poésie

Où la vie se contemple tout est submergé
Monté les couronnes d’oubli
Les vertiges au cœur des métamorphoses
D’une écriture d’algues solaires
l’amour et l’amour.
Tes mains font le jour dans l’herbe
Tes yeux font l’amour en plein jour
Les sourires par la taille
Et tes lèvres par les ailes
Tu prends la place des caresses
Tu prends la place des réveils.
*
Toutes les larmes sans raison
Toute la nuit dans ton miroir
La vie du plancher au plafond
Tu doutes de la terre et de ta tête
Dehors tout est mortel
Pourtant tout est dehors
Tu vivras de la vie d’ici
Et de l’espace misérable
Qui répond à tes gestes
Qui placarde tes mots
Sur un mur incompréhensible
Et qui donc pense à ton visage ?
Paul Éluard, L’amour la poésie, Gallimard, 1929, p. 21 et 47.
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