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04/05/2021

Rainer Maria Rilke, Sonnets à Orphée

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Sonnets à Orphée, VI

 

Est-il d’ici ? Non, sa vaste nature

a grandi dans l’un et l’autre royaume.

Qui a savoir des racines du saule

sera plus apte à ployer ses rameaux.

 

Allant au lit, ne laissez sur la table

ni pain ni lait : ils attirent les morts.

Mais leur apparition, lui qui conjure,

sous sa paupière à la douceur clémente,

 

qu’il la mêle, lui, à tout ce qu’il voit,

et que fumeterre et rue aient pour lui

charme aussi vrai que le plus clair rapport.

 

Rien ne peut altérer sa juste image,

rien, serait-elle ou de tombe ou de chambre,

célèbrerait-il agrafe, anneau, cruche.

 

Rainer Maria Rilke, Sonnets à Orphée, traduction Maurice Regnaut, dans Œuvres, Pléiade/Gallimard, 1997, p. 588.

 

02/07/2015

Rainer Maria Rilke, Sonnets à Orphée

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II

 

Et presque jeune fille alors et de surgir

de ce bonheur uni du chant et de la lyre

et tous ses voiles de printemps de resplendir,

si claire, et de se faire un lit dans mon oreille.

 

Et de dormir en moi. Et tout fut son sommeil.

Les arbres que j’ai pu quelque jour admirer,

ce lointain, ce touchable, et, touchés, les herbages,

et chaque étonnement m’atteignant en personne.

 

Elle dormait le monde. À quel point accomplie

tu la fis, dieu chanteur, qu’elle n’ait pas souhaité

être éveillée avant ? Vois, naquit et dormit.

 

Où est sa mort ? Ô ce motif, le créeras-tu

avant que ton chant ne se dévore ? — Où va-t-elle

sombrer hors de moi ?... Une jeune fille presque...

 

Rainer Maria Rilke, Sonnets à Orphée, traduction

Maurice Regnaut, dans Œuvres poétiques et théâtrales,

sous la direction de Gerald Stiec, Gallimard  Pléiade,

1997, p. 16.