02/07/2015
Rainer Maria Rilke, Sonnets à Orphée
II
Et presque jeune fille alors et de surgir
de ce bonheur uni du chant et de la lyre
et tous ses voiles de printemps de resplendir,
si claire, et de se faire un lit dans mon oreille.
Et de dormir en moi. Et tout fut son sommeil.
Les arbres que j’ai pu quelque jour admirer,
ce lointain, ce touchable, et, touchés, les herbages,
et chaque étonnement m’atteignant en personne.
Elle dormait le monde. À quel point accomplie
tu la fis, dieu chanteur, qu’elle n’ait pas souhaité
être éveillée avant ? Vois, naquit et dormit.
Où est sa mort ? Ô ce motif, le créeras-tu
avant que ton chant ne se dévore ? — Où va-t-elle
sombrer hors de moi ?... Une jeune fille presque...
Rainer Maria Rilke, Sonnets à Orphée, traduction
Maurice Regnaut, dans Œuvres poétiques et théâtrales,
sous la direction de Gerald Stiec, Gallimard Pléiade,
1997, p. 16.
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