05/09/2017
John Ashbery (1927-3 septembre 2017), Fragment, Clepsydre, poèmes français
C’est sûrement sur une des pages intérieures
Que l’histoire de sa timidité sera écrite
Avec toutes les pensées libertines d’un trajet
Grossièrement en forme de cœur autour d’un marais
Qui pour beaucoup de nous sera le voyage ultime
Vu la petite quantité de grâce qu’on nous a accordée.
Cette banalité qui est en fin de compte notre
Possession la plus précieuse, parce que permettant de
Nous élever au niveau de nous-mêmes, ce qui serait peu de chose
Sans la présence d’un tas d’amis et d’ennemis, tous
Disposés à nous prêter serment, nous comptant
Peu sur cet anoblissement de dernière heure, restent
Colossaux, leurs chapeaux à larges bords figurant
Toute la honte de la gloire, nous enfermant dans l’idée du nombre :
L’éther divisant nos victoires, anciennes et futures : dents et sang.
John Ashbery, Fragment, Clepsydre, poèmes français), traduction Michel Couturier, Seuil, 1973, p. 19.
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18/08/2012
John Ashbery, Poèmes français, dans Fragment
Simples, les arbres posés sur le paysage
Comme des gerbes de foin qu’on aurait laissé traîner là.
Le crottin des chevaux disparus, les pierres qui l’imitent,
Tout nous parle des cieux, qui ont créé cette scène
Par leur seule position.
Or en s’associant trop strictement aux trajets des choses
On perd cette sublime espérance faite de la lumière qui asperge les arbres.
Car chaque progrès est négation, de mouvement et surtout de nombre.
Ce nombre ayant perdu sa finesse indescriptible
Tout doit être perçu comme quantités infinies de choses.
Tout est paysage : perspective de rochers
Battues par d’innombrables vagues ;
Champs de blé à ne plus pouvoir en compter ; forêts
Aux sentiers perdus ; tours de pierre
Et enfin et surtout les grands centres urbains, avec
Leurs buildings et leurs populations, au centre desquels
Nous vivons notre vie, faite d’une grande quantité d’instants isolés
Pour être perdue au sein d’une multitude de choses.
John Ashbery, Poèmes français, dans Fragment, traduit de l’américain par Michel Aucouturier, Seuil, 1975, p. 18.
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