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31/10/2017

Maurice Rollinat, Les névroses

                                  Maurice Rollinat 1.jpg

Ballade des mouettes

 

En tas, poussant de longs cris aboyeurs

Aussi plaintifs que des cris de chouettes,

Autour des ports, sur les gouffres noyeurs,

Dans l’air salé s’ébattent les mouettes.

D’un duvet mauve et marqueté de roux,

Sur l’eau baveuse où le vent fait des trous,

On peut les voir se tailler des besognes

Et se risque sous le ciel en courroux,

Pour nettoyer la mer de ses charognes.

 

Flairant les flots, sinistres charroyeurs,

Et les écueils noirs dont les silhouettes

Font aux marins de si grandes frayeurs,

Elles s’en vont avec des pirouettes

De-ci, de-là, comme des girouettes.

Dans les vapeurs vitreuses des temps mous

Où notre œil suit les effacements doux

Des mâts penchant avec des airs d’ivrognes,

Ces grands oiseaux rôdent sur les remous,

Pour nettoyer la mer de ses charognes.

 

Et quand les flots devenus chatoyeurs

Dorment bercés par les brises fluettes,

On les revoit, avides côtoyeurs,

Éparpillant leurs troupes inquiètes

Aux environs des falaises muettes.

En vain tout rit, le brouillard s’est dissous ;

Ces carnassiers qui ne sont jamais soûls

Ouvrent encore leurs ailes de cigognes

Sur les galets polis comme des sous,

Pour nettoyer la mer de ses charognes.

 

Envoi

 

Vautour blafard, fouilleur des casse-cous,

Toi dont le bec donne de si grands coups

Dans les lambeaux pourris où tu te cognes,

Viens-là ! tes sœurs t’y donnent rendez-vous

Pour nettoyer la mer de ses charognes.

 

Maurice Rollinat, Les névroses, Bibliothèque

Charpentier, 1923, p. 241-242.