14/05/2020
Eugenio Montale, La Tourmente
Lumière hivernale
Lorsque je descendis du haut ciel de Palmyre
sur palmiers nains et propylées candis
et qu’à la gorge un étau m’avertir
que tu m’emporterais,
lorsque je descendis du ciel de l’Acropole
et trouvai, sur des kilomètres, des corbeilles
de poulpes et de murènes
(ces dents, une scie
sur le cœur qui se serre),
lorsque j’abandonnai cette cime aux aurores
inhumaines pour le musée gélifié
— momies et scarabées — (tu pâlissais,
ma vie unique) et vins comparer lave
et jaspe, sable et soleil, fange
et divine argile —
à l’étincelle
qui jaillit, je fus neuf, et fait cendres.
Eugenio Montale, La Tourmente et autres poèmes,
Traduction Partice Angelini, Gallimard, 1966, p. 91.
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20/05/2015
Eugenio Montale, La tourmente et autres poèmes
Jour et nuit
Même une plume en volant peut dessiner
ta silhouette, ou le rayon qui joue à cache-cache
entre les meubles, répercuté du toit
par un miroir d’enfant. Sur le pourtour des murs
des traînées de vapeur allongent l’aiguille
des peupliers ; en bas sur le perchoir s’ébroue le perroquet
du rémouleur. Puis la nuit étouffante
sur la place, le bruit des pas, et toujours cette dure fatigue,
sombrer pour resurgir semblable
depuis des siècle, ou des instants, de cauchemars qui ne peuvent
retrouver la lumière de tes yeux dans l’antre
incandescent — les mêmes cris encore, les mêmes pleurs
sur la terrasse
si retentit le coup soudain qui te rougit
la gorge et brise l’aile, ô téméraire
annonciatrice d’aubes,
et que s’éveillent cloîtres et hôpitaux
au son lacérant des trompettes
(traduction Louise Herlin)
Eugenio Montale, La tourmente et autres poèmes, Poésies III, Gallimard,
1966, p. 33.
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