05/02/2021
Jonathan Swift, Correspondance avec le Scriblerus Club
À Alexander Pope,
Dublin, 20 septembre 1723
(...) J’ai souvent tenté d’établir une amitié entre les hommes de génie, et j’aimerais tellement que cela soit fait. Il y en a rarement plus de trois ou quatre dans une époque, et s’ils pouvaient être unis, ils chasseraient le monde devant eux. Je pense qu’il en était ainsi entre les poètes du temps d’Auguste, mais l’envie, l’esprit de partie et l’orgueil l’ont empêché parmi nous. Je compte pour rien les subalternes, desquels on est rarement sans avoir une vaste tribu, sous les noms de poètes et d’auteurs ; ceux-là même, je suppose, que vous dites vous accommoder de voir quelquefois lorsqu’ils se trouvent être modestes ; ce qui n’était pas fréquent parmi eux quand j’étais dans le monde.
Jonathan Swift, Correspondance avec le Scriblerus Club, traduction David Bosc, Allia, 2005, p. 133.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, CORRESPONDANCE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jonathan swift, correspondance avec le scriblerus club, amitié, génie | Facebook |
17/04/2019
Jonathan Swift, Lettres à Stella
5 mars 1712
Je vous souhaite un joyeux carême ; je déteste le carême, je déteste les changements de régime, la bouillie de froment et le beurre et le porridge aux herbes et les aigres visages dévots de ces qui ne revêtent le masque de leur religion que durant sept semaines. (…) J’ai dîné aujourd’hui avec le DrArbuthnot et nous avons fait un véritable dîner de carême, non quant au menu, mais à cause de l’état de sa femme et d’un ou deux de ses enfants qui étaient malades dans la même salle que nous, ce qui était largement aussi mortifiant que du poisson. (…] Je vais garder mon souffle pour refroidir ma bouillie de carême.
Jonathan Swift, Lettres à Stella, dans Œuvres, Pléiade / Gallimard, 1965, p. 782-783.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jonathan swift, lettres à stella, carême, porridge | Facebook |
17/12/2014
Jonathan Swift, Résolutions pour quand je vieillirai
Résolutions pour quand je vieillirai (1699)
Ne pas épouser une jeune femme.
Ne pas rechercher la compagnie des jeunes à moins qu'ils ne le désirent réellement.
Ne pas être acariâtre, morose ou soupçonneux.
Ne pas tourner en ridicule les manières, l'esprit, les modes, les guerres, etc.
Ne pas aimer trop les enfants ou les laisser venir trop près de moi.
Ne jamais répéter trop souvent la même historie aux mêmes personnes.
Ne pas être avare.
Ne pas négliger la décence ou la propreté de peur de tomber dans l'ignominie.
Ne jamais être trop sévère pour les jeunes et plutôt tenir compte de leur juvéniles excentricités et de leurs faiblesses. [...]
Ne pas donner son avis quand on ne vous le demande pas ni en encombrer personne que ceux-là seuls qui le désirent. [...]
Ne pas parler beaucoup et surtout de moi-même.
Ne pas me vanter de ma beauté, ou de ma force passée, ou de mon succès auprès des dames, etc. [...]
Ne pas être affirmatif ou opiniâtre.
Ne pas vouloir passer pour un homme qui observe toutes ces règles, de peur de n'en observer aucune.
Jonathan Swift, Résolutions pour quand je vieillirai, dans Œuvres, édition établie et annotée par Émile Pons, Pléiade, Gallimard, 1961, p. 1307-1308.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jonathan swift, résolutions pour quand je vieillirai, maxime, modestie | Facebook |