Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/07/2015

Gérard Titus-Carmel, Ici rien n'est présent

                                        gerard-titus-carmel.jpg

L’affût, c’est le nom secret de l’impatience quand le regard se lamine aux fentes de la persienne close. Qu’une grande prairie noire vous brûle le front et que l’ombre monte en vous, aussi rapidement que douleur ou marée.

 

Ô la violence de ces nuits de guet, la rosée perlant aux tempes de l’enfants posté là, au cœur de l’immensité, dans le silence des choses sans poids ni contours !

 

(Je restais ainsi des heures, les prunelles gonflées de solitude. Des ronces s’enchevêtraient au bord de mes paupières. Je connaissais la soif, la sauvagerie du corps, la déception.)

 

Gérard Titus-Carmel, Ici tien n’est présent, Champ Vallon, 2003, p. 105.

27/11/2012

Gérard Titus-Carmel, Ici rien n'est présent

imgres.jpeg

                                    Angle mort

J'appuie le front contre ma paume, le coude bien planté au bord du monde et, les yeux grand ouverts, je disparais lentement en moi.

 

Pourtant ma mémoire pèse de tout son poids, cherchant un point d'équilibre entre ce qu'elle tisonne infiniment et ce qu'elle s'obstine à oublier. La conque amie de la main devient alors tiédeur et confidence, que la nuit seule parvient à distraire Mais déjà au silence de mon corps j'ai gagné une contrée, une terre d'innocence. Et j'attends.

 

(L'attente, c'est cet animal sans nom, recroquevillé dans le contre-jour de la chambre, comme à l'angle perdu de la nuque : il tremble de tous ses membres sans que cela se voie vraiment, et c'est pitié. Mais les murs se resserrent autour de lui, qui n'est plus que boule et terreur.

 

Et je m'avance dans l'attente, c'est-à-dire vers l'ombre de la bête innommée, suffocante.

 [...]

Gérard Titus-Carmel, "Angle mort", dans Ici rien n'est présent, Champ Vallon, 2003, p. 49-50.

21/10/2012

Gérard Titus-Carmel, Ici rien n'est présent

imgres-3.jpeg

                             Angle mort

                                   (récit)

 

   J'appuie le front contre ma paume, le coude bien planté au bord du monde et, les yeux grands ouverts, je disparais lentement en moi.

 

   Pourtant ma mémoire pèse de tout son poids, cherchant un point d'équilibre entre ce qu'elle tisonne infiniment et ce qu'elle s'obstine à oublier. La conque amie de la main devient alors tiédeur et confidence, que la nuit seule parvient à distraire. Mais déjà au silence de mon corps j'ai gagné une contrée, une terre d'innocence. Et j'attends.

 

   (L'attente, c'est cet animal sans nom, recroquevillé dans le contre-jour de la chambre, comme à l'angle perdu de la nuque : il tremble de tous ses membres, sans que cela se voie vraiment, et c'est pire. Mais les murs se resserrent autour de lui, qui n'est plus que boule et terreur.)

 

Et je m'avance dans l'attente, c'est-à-dire vers l'ombre de la bête innommée, suffocante.

[...]

 

Gérard Titus-Carmel, Ici rien n'est présent, Champ Vallon, 2003, p. 49-50.