Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

07/10/2021

Philippe Jaccottet, Le bol du pélerin (Morandi)

          Unknown-1.jpeg

(Une récente nuit, je me suis rappelé une halte marocaine, à Ouarzazate : des sables roses et des sables jaunes, des rafales de vent   de sable, au loin, comme des drapeaux, et ces espèces de forteresses qui tremblaient dans l’excès de lumière sans être des mirages, mais à peine distinctes du sol où elles avaient été bâties, brève entrevision, un matin, pourquoi si poignante ? Je me trouvais dans un endroit du monde où je n’avais même pas désiré passionnément me rendre, et sans qu’aucune aventure personnelle n’y fût mêlée (car enfin bien sûr, s’il y avait eu dans un de ces palais ou forteresses entrevus — comme au cinéma ! — une femme captive, ou pas, que je serais allé rejoindre —  délivrer !— mon émotion fût allée de soi et personne ne s’en fût étonné — sinon du fait que c’était moi le héros ! — mais non) ; et ce que j’avais entrevu ainsi à quelque distance n’était même pas un site imprégné par la présence, ou l’absence de dieux, comme l’Égypte ou la Grèce m’en avaient offert en d’autres occasions.

 

Philippe Jaccottet, Le bol du pèlerin (Morandi), La Dogana, 2006, p. 63.

Les commentaires sont fermés.