01/04/2017
Jean Tardieu, Accents
Le solitaire
Ce cloître est grand, que l’absence fait naître ;
Pourtant les murs étoufferaient leur maître
S’ils n’étaient peints de fresques et de fenêtres.
L’une est parfois un miroir vis-à-vis
Où seulement la colline revit,
Pâle trésor à l’univers ravi ;
Et si le jour a des plumes plus douces
Pour déposer le pollen et la mousse
En la cellule où l’amertume pousse,
Le soir envoie une ombre de cyprès
Sur le mur blanc. La lune veille auprès.
La nuit s’engrange au fond d’un cœur secret.
Mais tout le songe enchaîné des images
N’est qu’un captif aux mains de la Plus Sage
Dont les portraits et les mille visages
Sont regardés au long de ce moutier
Et font pleuvoir sur le monde effrayé
Un regard clair et jamais détourné.
Jean Tardieu, Accents, Gallimard, 1939, p. 57.
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