08/04/2016
Henry James, Carnets, dans Un portrait de femme et autres romans
( ...) je ne parlerai pas d’Ivan Tourguéniev, le plus délicieux et le plus aimable des hommes, ni de Gustave Flaubert, que je serai toujours si heureux d’avoir connu ; nature puissante, grave, mélancolique, virile, profondément corrompue mais non corruptrice. Quelque chose en lui me plut beaucoup et il se montra fort bienveillant envers moi. Il dominait de la tête et des épaules tous les autres, ceux que je rencontrais chez lui le dimanche après-midi — Zola, Goncourt, Daudet, etc. (Je veux dire en tant qu’homme — non comme causeur, etc.). Je me rappelle en particulier certain après-midi — en semaine — où j’allai le voir et le trouvai seul. Je suis resté longtemps assis en sa compagnie. Une impulsion soudaine le poussa à me réciter un petit poème de Théophile Gautier, « Les Vieux Portraits » (ce qui déclencha l’impulsion, c’est que nous venions de parler des poètes français, et il avait exprimé sa prédilection pour Théophile Gautier plutôt qu’Alfred de Musset ; il était plus français, etc.
Henry James, I. Carnets, traduction Louise Servicen, revue par Évelyne Labbé, dans Un portrait de femme, et autres romans, Gallimard / Pléiade, 2016, p. 1339.
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