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17/03/2016

Franz Kafka, Lettres à Otla

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À Otla et Josef David              Matliary, juin 1921

 

Chère Otla,

 

Voilà déjà longtemps que je ne t’ai pas écrit, quand je vais bien, dans la forêt, au milieu du silence total avec les oiseaux, le ruisseau et le vent, je me tais moi aussi, et quand je suis désespéré, dans la villa, sur le balcon, dans la forêt détruite par le bruit, je ne peux pas écrire parce que ma lettre est lue aussi par les parents. Ce dernier cas est malheureusement le plus fréquent, mais le premier se produit également, ainsi par exemple les deux derniers après-midi, aujourd’hui ce n’est plus tout à fait cela ; mais je ne m’en étonne pas, il n’y a pas dans le monde autant de silence qu’il m’en faut, d’où il suit qu’on ne devrait pas se permettre d’avoir besoin de tant de silence. Mais qu’on puisse l’avoir ici quelquefois, bien que tout soit déjà comble et qu’à partir du 1er le comble sera probablement encore comblé (les gens logent dans les cabines de bains, dans n’importe quel cagibi, et moi j’ai une belle chambre avec balcon) — de cela je suis extrêmement reconnaissant et c’est l’une des raisons pour lesquelles jusqu’ici je n’ai pas bougé. En ce moment par exemple, il est à peu près 7 heures du soir, je suis allongé sur ma chaise longue à l’entrée d’une cabane à trois pans de mur avec 2 couvertures, fourrure et coussin, devant la cabane s’étend une prairie (...) toute jaune, blanche, mauve de fleurs que je connais et d’autres que je ne connais pas, derrière la cabane le ruisseau passe en murmurant.

 

Franz Kafka, Lettres à Otla et à la famille, traduction de l’allemand par Marthe Robert, Gallimard, 1978, p. 132-133.

                                

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