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13/07/2012

André du Bouchet, Une lampe dans la lumière aride

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La poésie

               c'est refuser la vie — partie par partie —

   pour l'accepter tout entière —

 

que l'image se pulvérise et devienne dérisoire.

 

La banalité poétique se résorbe aussi bien que l'autre, seulement il faut l'avoir éprouvée, jusque dans la trame — ce qui n'est pas facile

 

                         *

 

Le poète est celui qui, dormant et sachant qu'il dort,

ne se réveille pas —

 

                         *

 

le poème sort avec sa lie

 

hors de sa gangue d'angoisse

et de toute la boue qui le charrie

 

                        *

 

la poésie, c'est cette exaspération des facultés critiques,

               de cette faculté critique qui ne mord pas sur la matière

il y a cette révélation de l'insipide

— de cette clarté

 

qui court en avant d'elle-même

 

ce qu'il y a de plus éclatant, de plus exotique, est comme la préfiguration de sa banalité

 

qui n'est suscité que pour être incinéré

 

l'image n'est que l'indication de sa course, de sa rapidité.

 

Nous sommes — heureusement — en retard sur cette banalité.

 

Notre vie, notre poids, notre étonnement, notre lenteur — notre admiration.

 

on a touché l'essence de la poésie, quand on sent passer ce souffle incolore, ce souffle

 

le vent dont nous sommes affublés

 

le feu, c'est cet immense retard sur la banalité —

 

l'image n'est suscitée que pour être incinérée.

 

 

André du Bouchet, Une lampe dans la lumière aride, Le Bruit du temps, 2011, p. 249, 252, 253, 254-55.

 

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