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27/10/2012

William Cliff, En Orient

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                (l'amour des enfants)

 

dans mon enfance j'avais pour amie

une putain qui œuvrait au bar de la gare

elle s'appelait Mariette elle m'aimait

je lui portais des fleurs et en échange

elle me donnait de grandes sucettes

 

elle était ce qu'on appelle une "sotte"

avec beaucoup de rouge sur les joues

et de longs cheveux teints en noir qu'elle faisait

boucler sur son dos elle passait devant la maison

faisant sonner ses hauts talons

et balançant vigoureusement sa sacoche

 

or Maman n'aimait pas que je fréquente

la "demoiselle de la gare" qui était

pourtant si bonne si aimante et qui souffrait

sans doute d'un manque d'enfant mais moi

je ne pouvais pas je savoir et j'étais tout séduit

qu'on eût tant d'amour pour mon imperceptible personne

 

enfants négligés enfants mal aimés

laissez-vous dorloter par les pauvres putains

qui rêvent de vous écraser contre leur gorge

déchirée de coups d'ongles et vous vieilles pédales

ne désirez-vous pas étreindre ces enfants

entre vos bras tremblants de tristes peaux pendantes ?

 

          — oh oui ! certainement

 William Cliff, En Orient, Gallimard, 1986, p. 48-49.