31/10/2025
Pierre Jean Jouve, Moires

Mémoire
Dans ce château aux trente fenêtres règne la personne aimée, par moi inventée et vraiment fausse. Je suis seul à le savoir quand je passe, voyageur étranger au pays. Nul ne m’interroge, personne ne sait ; le secret est bien gardé. Cependant une part de cette femme était une part réelle de ma vie. En haut vous voyez les remparts de glace ; et en bas le petit ruisseau près des saules ; des montagnes dangereuses se resserrent en ce point même. Les grandes pièces d’apparat ont été fermées depuis ; mais elles me sont familières, puisque j’y ai mis la mort.
Pierre Jean Jouve, Moires, dans Œuvre I, Mercure de France, 1987, p. 1051.
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