20/09/2018
Jacques Roubaud, Peut-être ou la nuit de dimanche, autobiographie romanesque
Au début de votre siècle, quand la porte du temps a tourné sur ses gonds et montré le vingt et unième qi chassait le vingtième révolu, je me suis inventé une forme poétique. Je l’ai nommée « trident », ne me demandez pas ici pourquoi, ni de sa présentation dans une page, a priori étrange ; la forme trident a pour moi, fatigué, l’avantage d’être très, vraiment très très courte, ne comptant que treize syllabes (je ne précise pas la maniére de les compter) soit quatre de moins que sa cousine lointaine, le haïku, qui lui a servi de modèle.
Dans la ferveur de la découverte de la forme, j’en ai produit des tas, et j’avais même rêvé d’arriver à dix mille. J’en suis loin.
Depuis mes troubles variés, bientôt depuis trois ans, je compose, quand j’en ai le courage (il y a peu de « syllabes » mais avoir besoin d’un temps très long pour les placer convenablement dans leurs trois vers, n’est pas rare).
(…)
d’un mort
je touche ce mort
en pensée
je l’essuie de larmes
*
le vrai
le vrai je voudrais
mais pourquoi ?
pour en faire quoi ?
Jacques Roubaud, Peut-être ou la nuit de dimanche, autobiographie romanesque, Seuil, 2018, p. 100-101.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Roubaud Jacques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques roubaud, peut-être ou la nuit de dimanche, autobiographie romanesque, trident, haïku | Facebook |