Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

29/07/2019

Jacques Borel, Un voyage ordinaire

       CAF86013870.jpeg

(…) Se trouver, se découvrit, on n’ose plus les employer, ces mots, ça fait sourire, si on en est loin de tout ça ! N’empêche… S’approcher, mettons, se rapprocher. Et voilà ce dont, toi, tu t’es approché. Rongé, pourrissant, le continent englouti que tu avais cru d’abord, quand il a enfin commencé à émerger, à t’apparaître, découvrir plein et rayonnant. Et quand cela serait… Tu accèdes plus tard à ce que les autres et toi-même ne peuvent désormais que rejeter. Raison de plus pour toi de te répéter le mot de Novalis que tu ne cesses, lancinant, obsédant, une espèce d’ordre, de plus en plus, qui se précise, d’entendre résonner en toi : « C’est à présent seulement que je commence à me connaître et à jouir de ce que je suis… c’est pourquoi justement je dois partir. »

— Seulement je ne jouis pas, moi, de ce que je suis. De cela aussi, empêché. Et quand bien même peut-être il n’y aurait pas le lieu d’où je reviens et dont je ne m’éloigne jamais que pour, honteux, accablé, y retourner.

 

Jacques Borel, Un voyage ordinaire, Le temps qu’il fait, 1993, p. 33-34.