30/06/2012
Christian Prigent, La Vie moderne (L'amour : une idylle au club)
L'amour : 13 (une idylle au club)
Entre pomme et pamplemousse on eut le miel
Des paroles : toi collant noir&blanc moi
Casque de moto — hop ! parti pour la vie
En allure chat de gouttière à l'éternel
Appel du regard univoque. Au bleu tur
Quoise et soleil Red Sea tes cheveux trempés
Roux et tes trous rampants sur le fond caché
Magiquement : ah si raide, ce lieu d'ur
Gence on vit l'intérêt de nos synergies
Rutiler (Ô ma grenadine for ever) !
Ô mon glamour gredin à jamais surgi
Flic, flash in the middle of the picture !
Christian Prigent, La Vie moderne, P. O. L., 2012, p. 67.
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17/08/2011
Christian Prigent, Suite Diderot
(Pour un souper fin)
Ah, ces orages domestiques (« vie de mer ») !
Demain 84 gouttes et adieu + un tube (et
Adieu vacheries des planchers !) : si amer
Est ce ressassement d’ébats chiffonniers
Le jour — Madame allons aux volières de la nuit
Huiler nos viandes dans ces spas grand chic pur
Beurre (www.gayfriendly.com) : là fur
Tivement gouttent vos secrets vos pipis.
Puis carpaccio de cheval et la garbure
De coq de luxe et l’épure (titubant / pas
Tombant) de vos chaloupés chous (Gradiva !)
Parmi ces si incorrectes nourritures.
Christian Prigent, Suite Diderot, illustré par Detlef Baltrock, ficelle n° 103,
Atelier Rougier. V., "Les Forettes", 61380 Soligny le Trappe.
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10/04/2011
Christian Prigent, Compile
La voix-de-l’écrit
J’écris des livres. Ils sont édités.
On pourrait en rester là.
Mais je vais aussi lire en public.
Ce n’est pas seulement pour publier à nouveau les textes. C’est pour tenter de produire un nouvel objet d’art. Cet objet est irréductible à son support textuel. Il n’a de sens, cependant, qu’adossé à ce support. Il prétend en proposer une forme particulière d’apparition. Cette forme dépend des conditions objectives de la performance. Il s’agit d’un spectacle, qui suppose une mise en scène minimale. Celle-ci règle la position et la gestuelle d’un corps dans l’espace, le volume, le tempo et la modulation d’une voix, le traitement par cette voix des effets d’émotion et de sens inscrits dans une langue. Une performance orale est à chaque fois l’expression stylisée d’un affrontement entre langue, voix et corps.
Style
La lecture ainsi pensée parie sur une homologie entre l’excentricité écrite qu’on appelle un « style » et la performance vocale qui prend en charge cette excentricité.
Un style note la singularité de l’expérience de celui qui le forme. Cette singularité s’incarne dans phrasé — auquel, justement, on identifie un auteur. Ce phrasé exécute une partition rythmique et y concrétise les effets d’une voix. La coloration particulière d’un style est l’effet de cette exécution. Rien n’y relève d’abord de l’articulation des significations. Au contraire, le style s’identifie plutôt à une sorte d’emportement abstrait (des mesures, des fréquences et des tempos) qui traverse et secoue la constitution des significations.
La lecture scénique à haute voix a pour projet la mise en évidence de ce phrasé. Elle s’efforce de la projeter démonstrativement, sans en réduire la complexité. C’est-à-dire qu’elle en développe la structure sonore, la découpe respiratoire et l’arabesque rythmique. Pour montrer que cette texture, cette découpe et cette arabesque constituent a forme propre de l’écrit. Et pour indiquer comment cette forme, phrasée (c’est-à-dire dynamisée), produit conséquemment les effets d’émotion et les noyaux de sens que propose une écriture.
Christian Prigent, Compile, [avec un CD, voix de Christaian Prigent et de Vanda Benès],P. O. L., 2011, p. 7-8.
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13/03/2011
Christian Prigent, Météo des plages
(flash-back 1955/1948)
Tout n’est que cendre désormais tout n’est que cendre mais
De cette cendre sort un qui porte sa peau et le couteau
Pour couper soi de soi (qui sera soi tu ne le sais
Pas : la tête est encore infime et blême dans des hauts).
Dans l’épaisseur de suie de mélancolie, va, accélère — c’est
Au cinéma, les brutales nuées roulent des manches sur
Des lividités inapaisées. Sens la peau de tes joues fur
Ieusement tirer les brides, hennir dans les cuirs ou corsets :
Tu es dans le baquet des épidermes bleus, des porcelaines de genoux,
Des ventres concaves, des os de transparences. L’aigre mot
De rance te rince de vomissures. Ou c’est (plage) ta mère sous
L’œuf, l’ardeur safran, le poids de paillasson des nuées,
Les seins d’été dans un bonnet d’âne épouvantablement
Blanc que califourche minuscule dans la contre-plongée
Toi, flou de sueur ou larmes ou du blanchissement du temps.
Puis Madame à peau de piquetis de poule fait sa Suzanne
En cabine. Et telle icelle aux vioques dans la feuillée son
Haleine furibonde te sirène aux considérations
De basques interdites : Guarpis d’là bas, bas d’la hanne !
Christian Prigent, Météo des plages, roman en vers, P.O.L, 2010, p. 111.
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