12/11/2023
Jules Supervielle, La Fable du monde
Celui qui chante dans ses vers,
Celui qui cherche dans ses mots,
Celui qui dit ombres sur blanc
Et blancheurs comme sur la mer
Noirceurs sur tout le continent,
Celui qui murmure et se tait
Pour mieux entendre la confuse
Dont la voix peu à peu s’éclaire
De ce que seule elle a connu,
Celui qui sombre sans regret
Toujours trompé par son secret
Qui s’approche un peu et s’éloigne
Bien plus qu’il ne s’est approché,
Celui qui sait et ne dit pas
Ce qui pèse au bout de ses lèvres
Et, se taisant, ne le dira
Qu’au fond d’une blafarde fièvre
Au pays des murs sans oreilles,
Celui qui n’a rien dans les bras
Sinon une grande tendresse,
Ô maîtresse sans précédent,
Sans regard, sans cœur, sans caresses,
Celui-là vous savez qui c’est
Ce n’est pas lui qui le dira.
Jules Supervielle, Œuvres poétiques complètes,
Pléiade/Gallimard, 1999, p. 385-386.
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