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12/12/2017

Jean Genet, L'Atelier d'Alberto Giacometti

                     Jean Genet, L'Atelier d'Alberto Giacometti, statue, gris

   Il sourit. Et toute la peau plissée de son visage se met à rire. D’une drôle de façon. Les yeux rient, bien sûr, mais le front aussi (toute sa personne a la couleur grise de son atelier). Par sympathie peut-être il a pris la couleur de la poussière. Ses dents rient — écartées et grises aussi — le vent passe à travers.

   Il regarde une de ses statues :

   lui : C’est plutôt biscornu, non ?

   Ce mot il le dit souvent. Lui aussi est assez biscornu. Il gratte sa tête grise, ébouriffée. C’est Annette qui a taillé ses cheveux. Il remonte son pantalon gris qui tombait sur ses souliers. Il riait il y a six secondes, mais il vient de toucher à une statue ébauchée : pendant une demi-minute il sera tout entier dans le passage de ses doigts à sa masse de terre. Je ne l’intéresse pas du tout.

 

Jean Genet, L’Atelier d’Alberto Giacometti, dans Œuvres complètes, v, Gallimard, 1979, p. 45.

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