15/01/2012
Jean-Philippe Salabreuil, La liberté des feuilles
26 décembre 1962
Désespoir en un mot qui ne tinte jamais
Par les prairies brumeuses du poème
On ne voyait dans l’ombre qu’ombres silencieuses
Qui marchent qui s’écartent et renouent quand il gèle
Averse blanche de la lune comme d’une âme
Un peu de neige ou le trop plein d’une fontaine
Et le désespéré chantait encore à la Noël
Pour ce qu’il y découvrait déjà d’aubes lointaines
Mais ce parfum d’avril au pied des pins la femme
Odorante aux résines de lumière et tel
Un soleil vivace l’enfant qui pardonne ses branches mortes
À l’aubépine ô veillées de la mort maintenant que m’importe ?
Je suis là
Vous me croyez vivant
Je laisse mes yeux ouverts
Je regarde la nuit
Et je sais pour vous plaire
Y poster deux hiboux
Je les poudre d’étoiles
Et les chemins sont fleuves
Entre berges de boue
Je suis là je murmure
Et ces mots vous comprennent
Comme comprend le vent
Ce mélèze où nous sommes
Inondés de fraîcheur
Mais moi je suis ailleurs
Je ne suis pas vivant
Je suis mort et transi
Je ne suis pas ici
Simplement je vous parle
Et vous écoutez sans savoir
Combien ces choses sont lointaines
Combien me font ces feuillages d’ennui
Qui nous dépassent dans la nuit
Et demain seront les traces
De mes pas dans l’autre nuit.
Jean-Philippe Salabreuil, La liberté des feuilles, Gallimard, « Le Chemin », 1964, p. 51 et 9.
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