10/12/2023
Paul Verlaine, Jadis et Naguère
Langueur
Je suis l’Empire à la fin de la décadence,
Qui regarde passer les grands Barbares blancs
En composant des acrostiches indolents
D’un style d’or où la langueur du soleil danse.
L’âme seulette a mal au cœur d’un ennui dense.
Là-bas on dit qu’il est de longs combats sanglants.
Ô n’y pouvoir, étant si faible aux vœux si lents,
Ô n’y vouloir fleurir un peu cette existence !
Ô n’y vouloir, n’y pouvoir mourir un peu !
Ah ! tout est bu ! Bathylle, as-tu fini de rire ?
Ah ! tout est bu, tout est mangé ! plus rien à dire !
Seul, un poème un peu niais qu’on jette au feu,
Seul, un esclave un peu coureur qui vous néglige,
Seul, un ennui d’on ne sait quoi qui vous afflige !
Paul Verlaine, Jadis et Naguère, dans Œuvres poétiques
complètes, Pléiade/Gallimard, 1962, p. 570-571.
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