07/02/2013
Alexis Pelletier, Comment ça s'appelle
Revenir aux oiseaux
Des mois sans oiseaux
je veux dire le mot oiseau
Et d'y revenir c'est comme un grand dépaysement
Je me suis souvent demandé pourquoi les oiseaux
et la question est aussi bête que
pourquoi le bleu ou pourquoi peindre
le même motif et pourtant la question
reste même si la réponse la modifie progressivement
Ce n'est pas vraiment le mot oiseau qui m'arrête
ni l'oiseau en général mais un oiseau particulier
ou un vol d'oiseaux particulier en ville surtout
des étourneaux mais pourquoi pas
en bord de Seine des bernaches cravants
avec les changements irréguliers de leur troupe ou
bruit grondant
Cela fonctionne par glissements
le mot oiseau porte en lui l'appel d'une précision
plus grande et alors de prendre dans
le réservoir percé de la mémoire
Et les souvenirs mobilisent un espace
un corps fluctuant je me souviens très bien
d'un eider observé à la jumelle
en plaine d'Alsace je ne sais sur quel lac
et photographié et de l'immense
bonheur intérieur au télescopage du
canard plongeur et de l'édredon de mon enfance
celui d'un marron foncé et que je n'ai jamais
oser déchirer pour voir comment les plumes à l'intérieur
j'en voyais un enfin ce n'était pas des blagues
l'histoire des plumes
[...]
Alexis Pelletier, Comment ça s'appelle, Tarabuste, 2012, p. 76-77.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alexis pelletier, comment ça s'appelle, oiseaux, mémoire, eider | Facebook |