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09/09/2013

William Cliff, Écrasez-le

William Cliff, Écrasez-le, chômer

                 Chômer

 

Depuis un mois j'étais chômeur :

j'ai dû m'inscrire rue du Boulet

me présenter rue de l'Escalier

enfin pointer rue Sainte-Catherine.

Pendant un mois j'ai fait la file

sans saluer nombre pédés

qui comme moi ne foutent rien

et vont pointer :

ça suffit à leurs besoins personnels

leur chope au Carroussel

le manger à Sarma

le shampooing du samedi

et le rimmel éventuel.

 

Certains vieux clous voulaient me tripoter

tout en faisant la file

puis ils disaient merci à l'employée

en reprenant leur carte cachetée.

 

J'avais l'impression d'être galeux

cherchais de la mystique en amour

(et c'est très mauvais signe).

À quoi je passais mon temps tout le jour ?

Aérer mon grabat et besogner dans ma cuisine.

 

Mais aujourd'hui on me rappelle à ma fonction sociale

et de nouveau je suis un vrai un pur

je peux dire merde à mes amours sentimentales

et comme un mat dresser mon membre vers l'azur.

 

 

William Cliff, Écrasez-le, Gallimard, 1976, p. 89-90.