25/04/2025
René Char, Le Poème pulvérisé
Marthe
Marthe que ces vieux murs ne peuvent pas s’approprier, fontaine où se mire ma monarchie solitaire, comment pourrai-je jamais vous oublier puisque je n’ai pas à me souvenir de vous : vous êtes le présent qui s’accumule. Nous nous unirons sans avoir à nous aborder, à nous prévoir comme deux pavots font en amour une anémone géante.
Je n’entrerai pas dans votre cœur pour limiter sa mémoire. Je ne retiendrai pas votre bouche pour l’empêcher de s’entrouvrir sur le bleu de l’air et la soif du jardin. Je veux être pour vous la liberté et le vent de la vie qui passe le seuil de toujours avant que la nuit ne devienne introuvable.
René Char, Le Poème pulvérisé, dans Œuvres complètes, Pléiade/Gallimard, 1981, p. 260.
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