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24/11/2016

Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe

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Cimetière de Saint-Christophe

 

                                                     Venise, septembre 1813

 

   À l’orée du cimetière, vers le Levant, on voit les sépultures des Grecs schismatiques et celles des protestants ; elles sont séparées entre elles par un mur, et séparées encore des inhumations catholiques par un autre mur : tristes dissentiments dont la mémoire se perpétue dans l’asile où finissent toutes querelles. Attenant au cimetière grec est un autre retranchement qui protège un trou où l’on jette aux limbes les enfants morts-nés. Heureuses créatures ! vous avez passé de la nuit des entrailles maternelles à l’éternelle nuit, sans avoir traversé la lumière ! Auprès de ce trou gisent des ossements bêchés dans le sol comme des racines, à mesure que l’on défriche des tombes nouvelles : les uns, les plus anciens, sont blancs et secs ; les autres, récemment déterrés, sont jaunes et humides. Des lézards courent parmi ces débris, se glissent entre les dents, à travers les yeux et les narines, sortent par la bouche et les oreilles des têtes, leurs demeures ou leurs nids.

 

François-René de Chateaubriand, Mémoires d’Outre-Tombe, Quarto Gallimard, Tome 2, 1997, p. 2778-2779.

 

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