13/11/2016
Ariane Dreyfus, Le dernier livre des enfants
Amherst (Emily Dickinson)
Je n’ai pas vu l’océan, mais l’arbre du XIXe siècle.
L’écorce n’a pas cessé de vivre
Elle ouvrait sa fenêtre
Pour nourrir les petits garçons
Si seule
Qu’elle est encore là
Dans ses pattes jointes
Un petit écureuil gris d’Amérique
Grignote à son tour
Une parcelle de ce monde
La terre sous les arbres sent si fort
On devient sage rien qu’en respirant
Quelque part le cimetière quelque part la maison
De quelques pas
L’angoisse qui se penche
L’humour la fait droite
Sombre jusqu’aux épaules étroites
La seule photo est minuscule
Enfermée en transparence
Elle est devenue le plus petit clou de la demeure
Mais il brille
Enfin un voyage
Où je n’ai pas bougé !
Je traverse ses pièces
Heureuse de ne rien chercher
Ses outils pour le pain sont tout noirs
De temps en temps s’être éclairci la voix
Sur le papier sans dimension
Neige ou ricochets
Ses messages sont les messagers
Qui tombèrent des manches
Je sais ouvrir un livre
Je m’assois
Adossée à rien
Entre deux miettes
Un moineau
Ariane Dreyfus, Le dernier livre des enfants,
Flammarion, 2016, p. 68-69.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Saba Umberto | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ariane dreyfus, le dernier livre des enfants, amherst (emily dickinson), écureuil, voyage | Facebook |
Les commentaires sont fermés.