21/06/2012
Pascal Commère, Tashuur. Un anneau de poussière
Herbes sèches. Comme joncs, du vent. Chevaux dépassant à peine, tiges hautes, moutons plus loin — combien ? À peine visibles entre les touffes. Deux bergers, et deux autres encore — plus jeunes. Ah si jeunes. Posent pied à terre, s'accroupissent sur les talons comme on le fait ici. Nous leur tendons une tranche de pain. Les bêtes se rapprochent, nez au sol parmi les hautes tiges jaunes. Elle dit : trente-cinq jours pour venir jusqu'ici, et cinq encore pour Ulaanbataar. Je demande pourquoi Ulaanbataar. Elle dit : industrie de la viande. En selle de nouveau, rejoignant le troupeau, l'entourant. J'ai cru qu'ils faisaient paître, mais non. Ils font route ensemble, j'en compte six ( en réalité neuf, à surveiller le troupeau jour et nuit, se relayant) qui poussent de leur fouet — manche dressé appuyé sur l'épaule — bœufs (une trentaine) et moutons (quatre cents, ils ont dit), l'immense troupeau bientôt rassemblé vers la rivière là-bas, plusieurs centaines de mètres d'ici on mesure mal avec les ombres. Un autre galope vers nous — le chef des bergers, elle dit. Genou à terre, la longe roulée à son poignet. Nous lui tendons un bol, raviolis de mouton (buuz). Quelques mot alors, et le vent — lèvres et doigts noircis. Ils viennent de Hövsgöl, tout au nord, près de la frontière russe. Huit cents kilomètres en quarante jours, elle traduit. Rapide calcul, vingt par jour. Elle dit oui, et quand ils sont à la recherche d'eau ils peuvent en faire jusqu'à trente-cinq...
Pascal Commère, Tashuur. Un anneau de poussière, Obsidiane,2012, p.107.
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