20/09/2023
Robert Desnos, Sirène-Anémone
Sirène-Anémone
Qui donc pourrait me voir
L’anémone du soi
Fleurit sous mes fougères
Moi la flamme étrangère
O fougères mes mains
Hors l’armure brisée
Sur le bord des chemins
En ordre sont dressées
Et la nuit s’exagère
Au brasier de la rouille
Tandis que les fougères
Vont aux écrins de houille
L’anémone des cieux
Fleurit sur mes parterres
Fleurit encore aux yeux
À l’ombre des paupières
Anémone des nuits
Qui plonge ses racines
Dans l’eau creuse des puits
Aux ténèbres des mines
Poseraient-ils leurs pieds
Sur le chemin sonore
Où se niche l’acier
Aux ailes de phosphore
Verraient-ils les mineurs
Constellés d’anthracite
Paraître l’astre en fleur
Dans un ciel en faillite
En cet astre qui luit
S’incarne la sirène
L’anémone des nuits
Fleurit sur son domaine
Alors que s’ébranlaient avec des cris d’orage
Les puissances Vertige au verger des éclairs
La sirène dardée à la proue d’un sillage
Vers la lune chante la romance de fer
Sa nage déchirait l’hermine des marées
Et la comète errant rouge sur un ciel noir
Paraissait par mirage aux étoiles ancrées
Rayait de feu le ciel et d’écume les eaux
L’anémone fleurie aux jardins des miroirs
Et parallèlement la double chevelure
Fougères surgissez hors de la déchirure
Par où l’acier saigna sur le fil des roseaux
[…]
Robert Desnos, Sirène-Anémone [1929], dans Domaine public, Le Point du jour, Gallimard, 1953, p. 155-156.
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