22/07/2020
Bernard Noël, Le Mal de l'espèce
Le Mal de l’espèce
......Elle envoya des recommandations : il s’agissait de les suivre avec ponctualité. Elle exigeait que le désir soit préservé à l’extrême et outré autant que possible. Elle comptait sur ta volonté pour qu’ainsi soit ouverte dans la limite une brèche qui, certes, ne la romprait pas mais la repousserait encore et encore jusqu’à l’illusion de l’avoir dépassée. Elle aimait, tu l’as tout de suite compris, l’au-delà, c’est-à-dire cette région que nous portons à fleur de peau et que, pourtant, nous ne savons pas envahir pour nous abandonner simplement à la floraison du bonheur. Elle écrivit donc avec précision qu’elle attendait beaucoup de réserve le premier jour — une réserve passionnément tendue et qui, sûrement, aurait pour effet de créer un appétit beaucoup plus vif que la précipitation vers le plaisir.
Bernard Noël, Le Mal de l’espèce, dans La Comédie intime, Œuvres IV, 2015, p. 289.
Publié dans ANTHOLOGIE SANS FRONTIÈRES, Noël Bernard | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bernard noël, le mal de l’espèce, dans la comédie intime, désir, volonté, plaisir | Facebook |