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07/11/2017

Christine Guinard, Des corps transitoires (chute d'Icare)

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                                  Chute d’Icare

 

   Lorsque Icare se fut consolé de sa légère tristesse, regrettant à l’aube, son père et la terre délaissée déjà, troqués naïvement contre un moment de grâce ; lorsqu’il eut considéré la perte en lui, la peur du chemin, le battement acharné du cœur prenant son envol, il ouvrit délicatement son bras droit, serti d’une aile bleutée. Il tira jusqu’au milieu du bras, guida jusqu’à l’épaule le gant gainé de plumes soyeuses et l’ajusta au plus près, afin de ne pas le laisser s’affaisser. Puis, encouragé par le souffle du vent contre sa poitrine nue, il entama le déploiement du bras gauche, pour y apprêter l’aile grise et bleue, identique à la première, de plumes et de soie, piquée comme de fins grains d epeau. Il replia contre son cœur le bras droit pour ne pas donner prise aux bourrasques fraiches du matin et voulut, agenouillé en terre tel un suppliant, se dresser, héroïque, pour braver devant lui les lois humaines.

 

Christine Guinard, Des corps transitoires, éditions mémoire vivante, 2017, p. 7-8.