23/09/2018
Jean Roudaut, Autobiographie de l'auteur en passant
photo David Collin
S’il est un souvenir que l’on doive retrouver au dernier moment de la vie, ce ne peut être que celui de l’origine et de la suffocation qui s’en suivit. Ce qu’on entend parmi les râles, c’est le bruit d’un vagissement. Faute d’avoir choisi de naître, on a escompté, au cours de la vie, des renaissances ; au dernier moment on laissera aller ce rêve ; on fermera les yeux sur ce qu’on a le plus aimé pour recouvrer la vacance antérieure. Le néant est, comme Dieu, selon l’idée que nous nous faisons de lui, sans durée ni qualités. Le dernier espoir du mourant porte sur ce que le vivant a perdu en naissant. Le cours de la vie est un passage de l’éblouissement pour les fruits à l’asservissement aux racines. En quête d’un souvenir originel, on rencontre la mort, aussi commune mais moins étrange que fut la naissance.
Jean Roudaut, Autoportrait de l’auteur en passant, Fario, 2017, p. 96.
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