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23/01/2012

Franck Venaille, C'est à dire

 

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          Certains qui tombent

 

Plusieurs, plusieurs fois, par jour de vie oui plusieurs

je me risquais dans mes souterrains

 

J'avais perdu ma part d'animalité

et n'étais plus rien qu'un homme

se souvenant de sa force d'autrefois, sa force

 

en allée

 

quand le père de votre père vivait encore vivant       Mais

je suis si nerveux cela me ronge de l'intérieur

ne vous attendez pas à lire la fin heureuse du poè-

Me

ainsi étais-je au-dessus de mes forces

espérant simple-

Met une fois encore entendre

hurler fort le chien si agité

 

devant la mer en larmes

[...]

 

 

       Peintures en trompe-l'œil sur les murs de l'hôpital

 

Heure noire de la journée, heure creuse, heure où les chevaux refusent toute nourriture. Animaux obstinés, comme je vous envie & vous demande de demeurer pleinement ce que vous êtes, installés calmement, les sabots de devant dans la fraîcheur de l'eau (claire, ici) lagunaire.

 

Arrivent alors des camions sans bâche où chacun des soldats prend appui sur le dos d'un autre. Quelle histoire ! C'est pour sauter à terre plus vite (bruits de croquenots) au cas où une embuscade barbaresque bouleverserait soudain les manuels traitant de stratégie militaire. Si ! Le premier blessé — pied droit arraché, moignon devenu festin pour chirurgiens carnivores — qui longuement, criera le nom de sa mère — est déjà un héros. Lâchez pour lui les chiens de guerre. Qu'ils partent tous pour la corvée de bois. C'est la mélodie des phares qui, bientôt, s'élève. Quelque chose qui tient d'un mouvement de symphonie primitive ! Eux (c'est-à-dire Moi-infant) se taisent. Obstinément ils se taisent. Obstinément les chiens.

Je dis qu'il faut plus que de la hargne pour gagner une guerre. Avant toute chose : vaincre l'ennemi principal : soi-même ! Et puis n'a-t-on pas pris l'habitude élégante de fusiller les cadavres en premier !

          LE BON DOCTEUR  DÖBLIN

          S'EN   VA - TA - LA CANTINE

          MANGER  DES   VONGOLÉS

          AVEC SA TANTE   HERMINE

 

Heure noire donc. Alors que la lumière de cette fin de journée, partout, (mer & canaux) est la même. Mais l'eau monte. Comme elle s'insinue, lentement, dans le salon d'attente de ce médecin du cerveau spécialisé dans la pensée rationnelle. Que lit-il ? : La Libre pensée. La Raison. Pensée & raison. Que peut-il faire de plus ? Se balancer d'un pied sur l'autre ! L'heure noire tombe l'hiver vers cinq heure, moment où la lagune vomit son fiel sombre.

 

L'instant où le More Othello et Desdémone échangent des serments d'amour.

(duo)

 

Tout m'est blessure. Je ne sais plus que faire pour vivre mieux.

 

Franck Venaille, C'est à dire, Mercure de France, 2012, p. 45, 77-78.

 

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