Henri Cole, Terre médiane
24/05/2019
Insomnie
La nuit, à la lueur de la lampe, certains insectes
planant ou volant, en noir, rouge ou or,
surgissent comme des acteurs, vaguement spectraux,
dans l’espace ordinaire de ma chambre.
Hier soir, ils ont exécuté La Tempêteavec frénésie,
exigeant que je joue Prospero et pardonne
à chacun. « Et puis quoi ! » ai-je gémi.
Ce cher Ariel surnaturel, je l’aimais,
le décor insulaire, l’opportune vengeance —
comment résister ? La pluie s’est mise à tomber,
emplissant le temps comme du sable ou l’entendement humain.
C’est comme si je rêvais ou étais mort.
J’ai pardonné à mon frère, il m’a pardonné.
Nous nous sommes serrés l’un contre l’autre dans l’obscur reflux de la nuit.
Henri Cole, Terre médiane, traduction Claire Malroux, Le bruit du temps, 2003, p. 83.
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