Jacques Audiberti, Poésies 1934-1948
27/06/2016
Raminagrobis
Mangez, mes petits ! Mangez, mes petits ! Mangez !
Demain nous aurons nos sites changés.
Demain nous saurons, de la mort, la tendre,
la seule raison qui n’est que d’attendre.
Buvez, mes petits ! Buvez, mes petits ! Buvez !
Demain nous aurons nos pouces lavés.
Nous pourrons, demain, sous la pamplemousse,
graisser, des saisons, le dard, s’il s’émousse.
Aimez, mes petits ! Aimez, mes petits ! Aimons !
Nous sommes des feux vêtus de phlegmons.
Nous font, nous guettant, fléchir goutte à goutte
trop d’yeux sur ces murs et sur cette voûte.
Mourez, mes petits, mourez, mes petits, et tous !
Qu’il n’en reste un seul, eût-il nom Titous.
Il rebâtirait un temple quelconque.
La pierre des soirs tourne dans la conque.
Jacques Audiberti, Poésies 1934-1948, préface de
Georges Perros, Gallimard, 1976, p. 94.
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